FARDC │Chronique d’une superposition des bandes armées – Acte 1 : Le Puzzle.

François Olenga, ex-Simba, ex-UPDF, ex-FAC et Général FARDC à la rétraite. (Ph. © Tiers)

Sous le régime Mobutu, le commandement militaire zaïrois était quasi-monoethniques. Après la chute de son régime, il s’en suit très vite la mise en place d’une armée hétéroclite mêlant des anciens enfants soldats et alliés étrangers devenus à la croisière décideurs au sein de la nouvelle force militaire du sous-continent. En cheval entre les Grands-Lacs et l’Atlantique, le Zaïre redevenu République Démocratique du Congo, passe très vite à d’une armée majoritaire issue des provinces de l’Ouest, à celle composée d’ex-Kadogo recrutés essentiellement dans l’ancien Kivu et d’anciens gendarmes Katangais ; mais aussi des étrangers. C’est aussi une aubaine pour les chasseurs en eaux troubles dirigeant des minuscules États des hautes terres de l’Est de l’Afrique qui rentrent à la conquête du Congo profond, voire de ses ressources naturelles.

À l’entrée des troupes de l’AFDL à Kinshasa, Laurent Désiré Kabila n’a pas encore une armée. Les anciennes forces spéciales et spécialisées de Mobutu n’existent presque plus ou venaient de prendre les larges.

Laurent Désiré Kabila fait face à un défi de se faire une armée pour stopper l’incursion Rwandaise à l’Est du Congo ex-Zaïre. A ses côtés, se dresse un allié de taille et conçu pour pénétrer l’intelligencia pro-Mobutiste dont l’indexation proche des FDLR n’étaient plus à révéler.

Jadis, le Congo avait la réputation d’être un tigre, mais vers la fin de la décennie 1990, les Rwandais savaient que, il n’était qu’un chat. Son Président de l’époque était lui-même un cadavre vivant. Plus rien n’était heureux au Congo, à part l’air et les oiseaux. L’armée de Mobutu se composait des pillards et de voleurs ; ils avaient réduit le pays prétendument le plus riche de l’Afrique centrale à la mendicité .
Dès l’aube de l’incursion rwandaise, ce sont des troupes étrangères qui se battent contre l’armée, ou ce qu’il en restait de l’armée, les mercenaires de Mobutu. L’AFDL n’a pas encore une armée digne de ce nom. En pleine organisation, elle devra compter sur certains des alliés pour se former.

Le Rwandais James Kabarebe prit la commande des troupes et il est nommé chef d’état-major général de l’armée rebelle qui vient désormais de prendre le pouvoir à Kinshasa. Ce combattant tutsi du Front Patriotique Rwandais découvrit ainsi ce nouvel eldorado qu’est Kinshasa, à la tête d’une armée composée des jeunes recrutés et formés dans le Kivu secourus par des rwandais, des ougandais, des angolais et des zimbabwéens mandatés pour asseoir le régime de Kabila.

Contrairement au côté Rwandais, du RCD-Goma ; les infiltrations des militaires ougandais au sein du MLC et du RCD-ML n’ont pas été très effectives. Nombreux d’entre eux s’exprimant exclusivement en kiganda et en anglais, ils n’ont pas pu s’intégrer facilement dans les communautés locales. Ils évoluaient dans des camps particuliers qui leur étaient exclusifs et n’ont pas pu apprendre les langues locales pour pouvoir se dissimuler plus facilement dans la population.

L’inverse était cependant possible. Après avoir perdu certains éléments au Congo, l’armée ougandaise n’a pas hésité de gonfler ses troupes par des volontaires congolais, sous la bannière de l’UPDF. Certains militaires congolais de l’ancienne rébellion du RCD-ML ont opté pour l’armée ougandaise lors du retrait des troupes. Il s’agit essentiellement des anciens gardes du corps congolais d’officiers ougandais et d’anciennes de la division stratégique dite PPU qui était composée des congolais ayant essentiellement évolués du côté ougandais avant la rébellion.

Par ailleurs, certaines des femmes et filles militaires ayant été recrutées à Beni, Bunia, Butembo et Lubero et s’étant rallié à des soldats et officiers ougandais ou avec lesquels ils avaient fait des enfants, avaient opté pour le l’exfiltration vers l’Ouganda avec leurs partenaires.

Comme ses ennemis ADF, l’UPDF de Museveni recourt parfois à des sujets frontaliers, qui servent d’éclaireurs ou des pisteurs au sein de l’armée ougandaise. Cela n’est pas perçu comme tabou de part et d’autre des monts Ruwenzori, en ce sens que le district de Kasese est habité par un peuple ayant pour la plupart leurs ancêtres du côté congolais. Lors du partage de l’Afrique en 1885, les populations frontalières n’ont pas brisé leurs liens de fraternité et d’amitié. Pour preuve, en groupements Banyangala et Basongora en République Démocratique du Congo et dans les cités Mbondwe et Bwera du côté Ougandais, il n’est pas étonnant qu’au sein d’une même famille, qu’il y ait des individus consanguins de nationalités différentes.

Il y a aussi des individus qui définissent leurs nationalités par le fait qu’ils soient de tel ou tel autre côté de la frontière. C’est ainsi que certains d’entre ceux-ci qui avaient servi dans l’armée rebelle préféraient plus le côté ougandais que congolais, doutant de la « garantie d’impunité » de Kinshasa, lors du retrait par Kampala de ses troupes du côté congolais.